Un BAC plus juste ?
J-M.Blanquer entend mettre en oeuvre une réforme du baccalauréat, engagement de campagne d’E.Macron. Il s’agirait de mettre fin au gâchis que représente le taux d’échec en 1re année de licence selon E.Philippe, ou de « remuscler » l’examen selon J-M.Blanquer, sans que l’on sache en quoi une réforme du baccalauréat améliorerait la réussite en licence ou en quoi consisterait son bodybuildage.
Le coût du bac, son inutilité, la désorganisation qu’il entrainerait en fin d’année scolaire sont des arguments aussi souvent avancés pour revoir son organisation : Sgen-CFDT, Snpden-UNSA (chefs établissements), Terra Nova et Institut Montaigne, think tank libéraux, s’en donnent à cœur joie. Sans doute n’ont-ils jamais pris la peine d’évaluer les conséquences sur l’organisation des établissements de l’introduction d’épreuves en cours d’année imposées aux enseignants de langues vivantes depuis la réforme Chatel du lycée (J-M.Blanquer était alors DEGESCO). Il s’agirait donc d’amplifier les périodes où faire classe relève de l’impossible, les élèves étant dispersés dans le passage d’épreuves non évaluées par l’examen national de fin d’année. Ou bien s’agirait-il de renvoyer au contrôle continu tout ce qui ne relèverait pas des 4 épreuves finales souvent évoquées ? Jamais dans ces scénarios n’est évoqué l’incroyable alourdissement de la charge de travail qui en résulterait pour les enseignants, voir encore nos collègues de langues pour le mesurer, ou bien l’amplification des pressions locales qui ne manquerait pas d’apparaître dans l’objectif de gonfler les taux de réussite, comme cela se pratique déjà au collège pour le DNB par exemple.
Dans tous les cas il en serait fini du diplôme national, premier grade universitaire, garant quoi qu’on en dise, de l’égalité de traitement de l’ensemble des lycéens sur le territoire.
Car si bien évidemment des problèmes majeurs se posent lors de l’accès au supérieur de nombre de nos élèves, ils ne relèvent pas des modalités d’organisation du baccalauréat. Les véritables blocages sont ailleurs : APB qui oriente des élèves dans des filières non choisies, manque criant de places dans certaines filières et indigence des moyens de l’enseignement supérieur pour faire face à la poussée démographique, absence de débouchés pour certains bacheliers, notamment professionnels ou technologiques. Enfin, et peut-être surtout, les fragilités d’un nombre croissant de lycéens, qui traversent le système éducatif (merveilleuse fluidité des parcours) sans réellement entrer dans les apprentissages, ne sont jamais prises en charge du fait des taux d’encadrement détestables et des baisses horaires disciplinaires en lycée comme en collège.
Alors mettre en place un bac par établissement -conséquence inévitable d’une part plus grande du contrôle continu ou des épreuves en cours d’année-, ayant la valeur que la société voudra bien lui donner, est-il de nature à résoudre ces difficultés ? C’est bien peu probable et l’objectif n’est évidemment pas là. En effet, E.Philippe envisage dans le même temps la mise en place de pré-requis pour l’accès aux filières universitaires, autrement dit d’une sélection. Toute ambition d’élévation des qualifications, indispensable au développement du Pays, semble donc écartée des projets du Gouvernement, les bacheliers pro seraient par exemple cantonnés à bac+1 au lieu de mettre en œuvre les dispositions nécessaires à l’amélioration de leur réussite en BTS.
Derrière cette réforme du bac se cachent finalement d’autres objectifs, celui d’une fluidité encore accrue des parcours dans le secondaire -la terminale et son bac restant le dernier goulet d’étranglement-, corrélé à celui de la mise en place d’une sélection à l’entrée à l’université. Le SNES-FSU portera d’autres orientations lors des concertations qui devraient s’ouvrir sous peu et auxquelles il associera la profession.