Madame la Rectrice,
Les personnels de l’académie ont reçu, hier 14 mars à 19h26, un message de votre part sur leur boîte mail professionnelle.
Nous tenons tout d’abord à vous indiquer combien la mise en forme du message est blessante. Comment comprendre le passage en gras « les personnels continuent à travailler », si ce n’est comme une marque de défiance terrible de l’institution dans l’engagement actuel des personnels ? Dès la journée de vendredi, alors que les consignes tardaient à venir, les professeurs ont imaginé comment, à distance, ils pouvaient rester en contact avec leurs élèves, les familles, et leurs collègues. Ils fournissent ce week-end un intense travail pour maintenir la continuité pédagogique, en fournissant au moyen des Espaces Numériques de Travail et des ressources de l’enseignement à distance, des cours, des devoirs, des activités pour les élèves afin que ceux-ci puissent se maintenir dans une logique d’apprentissage durant l’interruption des enseignements. Ils repèrent les élèves ayant des difficultés à accéder aux moyens de communication ou à un équipement informatique. Ont-ils besoin que vous leur rappeliez qu’ils « continuent à travailler » ?
Force aussi est de constater que votre message ne tenait compte en rien de l’alerte que nous vous avions adressée en début d’après-midi le 14 mars, alerte qui pointait les dérives de certains chefs d’établissement pouvant porter atteinte à la santé des personnels dans le contexte sanitaire : obligation de présence des personnels dans les établissements sur leur emploi du temps habituel, y compris avec leurs enfants, réunions plénières de tous les personnels, obligation de présence des AESH ou AED... Nous sommes choqués de la légèreté avec laquelle les consignes sanitaires sont appliquées par certains chefs d’établissement, du manque de cadrage académique eu égard à la crise sanitaire, et plus encore de la communication du Ministre de l’Éducation Nationale samedi 14 mars après-midi, que l’on pourrait qualifier de mise en danger délibérée des personnels.
Nous vous rappelons que, selon l’article R421-10-3 du code de l’éducation « en qualité de représentant de l’État au sein de l’établissement, le chef d’établissement prend toutes dispositions, en liaison avec les autorités administratives compétentes, pour assurer la sécurité des personnes et des biens, l’hygiène et la salubrité de l’établissement » et que vous êtes, à titre de supérieur hiérarchique, tenu de guider leur action en ce sens.
Le Président de la République a décrit la pandémie actuelle comme « la plus grave crise sanitaire qu’ait connue la France depuis un siècle » et a demandé à l’ensemble des français de limiter ses déplacements ; le Premier Ministre a annoncé des mesures fortes à 20h, hier 14 mars, postérieurement à votre message, en prenant la décision de fermer les lieux recevant du public et non indispensables à la vie du pays.
Dans ces conditions, la tenue de réunions dans les établissements en début de semaine prochaine, ou l’ouverture au public des CIO n’ont plus d’objet.
À aucun moment, la dégradation de la situation que traduisent les mesures nouvelles et exceptionnelles du Premier Ministre, 48 heures après celles du Président de la République, n’a été imaginée par personne.
Quelle sera la situation dans 36 heures ? La priorité va donc bien à la protection des personnels et de la population, elle passe par la limitation des regroupements ou la suspension des réunions inutiles selon les termes du Directeur Général de la Santé.
Le SNES-FSU vous demande, Madame la Rectrice, de garantir la santé et la sécurité des personnels du Second degré, enseignants, CPE, AED, AESH en prenant la décision qui s’impose : annuler et interdire les réunions prévues dans les EPLE ; limiter au maximum les présences en EPLE et CIO de ces personnels, pour privilégier exclusivement, dès lundi 16/03 au matin, le travail à distance.
Nous vous demandons de mettre fin aux convocations des personnels de vie scolaire, en particulier les AED, dans certains établissement, au mépris des nouvelles consignes sanitaires. Les AESH ne doivent, quant à eux, pas être convoqués, leurs missions ne pouvant être accomplies en présentiel.
Nous vous demandons la suspension de toutes les réunions inutiles en présentiel, comme les CA, conseils pédagogiques, conseils de classe, etc... Les conseils de classe de 3e, 2de, 1re et Terminale ayant une incidence sur la préparation de rentrée doivent pouvoir se tenir à distance (vidéoconférence, Pronote, échanges mail…). S’ils devaient se tenir en présentiel, cela ne peut se faire que dans des salles préalablement désinfectées et dans lesquelles les participants seraient éloignés d’un mètre, conformément aux consignes sanitaires. Les personnels ayant charge de garde d’enfants ou présentant des pathologies à risque doivent en être exemptés sans difficulté.
En ce qui concerne l’accueil des enfants des personnels soignants afin de garantir la continuité des soins, initiative que nous soutenons, nous pensons que l’appel au volontariat des personnels permettra sans mal de couvrir les besoins. Le sens du Service public de nos collègues ne s’est jamais démenti.
Enfin, en ce qui concerne les réunions d’instances prévues dans les prochains jours, les CAPA programmées n’ayant pas de caractère d’urgence doivent être reportées.
Les GT et CTA de préparation de rentrée doivent quant à eux, s’ils sont maintenus, se tenir dans des locaux préalablement désinfectés et dans une configuration où la distance entre les participants soit supérieure à 1 mètre, conformément aux consignes sanitaires.
Nous restons à votre disposition pour tout dialogue sur le sujet, y compris durant les jours non ouvrés.
Veuillez croire, Madame la Rectrice, en notre profond attachement au Service public d’Éducation.
Marianne Corrèze, Patrice Arnoux
Secrétaires académiques du SNES-FSU limoges