Madame la Rectrice, nous allons commencer par vous souhaiter la bienvenue dans notre académie et pour cette première prise de contact vous dresser le constat, inquiet, de la situation dans les collèges et lycées et de la mise en œuvre des réformes.
Ce CTA étant l’occasion de faire le bilan de la rentrée 2020, sur lequel nous reviendrons plus en détail dans les discussions, commençons par l’historique terrible des suppressions d’emplois qui ont frappé notre académie. De la rentrée 2008 à 2012, 500 emplois de professeurs de Second degré ont été ponctionnés, 80 ont été rétablis de 2013 à 2017, 60 ont été supprimés depuis que JM Blanquer est ministre. Le bilan est donc, depuis 2008, de 480 suppressions alors que sur la même période, 681 élèves supplémentaires ont été accueillis. Les conditions d’encadrement se sont donc fortement dégradées. Et que l’on ne nous dise pas que cette question est accessoire, sinon pourquoi brandir comme un étendard le dédoublement des CP/CE1 dans le primaire. L’allégement des effectifs est un levier majeur d’amélioration des performances scolaires, de démocratisation, pas seulement pour quelques-uns sur un temps bref de la scolarité, mais pour tous les élèves et sur la continuité de leur scolarité. Les personnels comme les familles portent fortement cette demande comme en témoigne le récent sondage de l’institut Ipsos commandé par la FSU.
Les contenus et modalités de formations ont été aussi fortement dégradés sous les coups des réformes successives réduisant le temps de classe au lycée avec la réforme Chatel, particulièrement meurtrière pour les horaires élèves -Monsieur Blanquer était alors DGESCO- et au collège avec la réforme Vallaud-Belkacem.
La réforme Blanquer du lycée, pousse toujours plus loin ces logiques, avec un horaire élève en 2de indigent, un affaissement des dotations conduisant à des choix pédagogiques dégradés et une déstructuration des parcours permettant en premier lieu de remplir les classes au maximum. Alors que se déploie, dans le lycée Blanquer, l’autonomie des établissements tant vantée depuis 15 ans, elle consiste surtout à gérer la pénurie organisée de moyens. L’individualisation des parcours des élèves fait désormais système, alors qu’elle ne repose sur aucune aide effective de l’institution pour déjouer les déterminismes sociaux ou de genre, les renforçant de fait. Les choix de spécialités de la voie générale sont à ce titre éclairant d’une politique profondément inégalitaire.
Le discrédit du ministre Blanquer est total, le sondage réalisé par l’institut Ipsos pour la FSU est sans appel.
Discrédit total auprès des professeurs qui rejettent ses réformes et ne sont pas dupes des annonces salariales très en deçà des pertes de pouvoir d’achat et du déclassement de nos professions : 63% des professeurs, PsyEN, CPE ne sont pas concernés par la très dégressive prime d’attractivité, professeurs documentalistes et CPE sont scandaleusement écartés de la très modeste (12,50€ par mois) prime d’équipement informatique.
Discrédit total alors que les opérations de mobilité sont devenues opaques, le bilan des lignes de gestion produit aujourd’hui et les mouvements inter et intra 2020 le démontrent. Dès janvier, les opérations de carrière disparaîtront aussi du champ paritaire. Les conséquences seront délétères pour les personnels et sur les collectifs de travail.
Discrédit total aussi auprès des parents d’élèves qui jugent, comme les personnels de l’éducation, le ministre Blanquer incapable de gérer la crise sanitaire et ses conséquences à court et moyen terme pour les élèves. Les parents d’élèves jugent tout aussi sévèrement les réformes éducatives mises en œuvre.
Pourtant, malgré l’explosion des difficultés de nos élèves en raison de la crise sanitaire, 1800 suppressions d’emplois de professeurs de Second degré sont encore annoncées pour la rentrée 2021, c’est irresponsable. Combien d’entre elles viendront, dans l’académie de Limoges, dégrader à nouveau les conditions d’encadrement de nos élèves, détériorer encore davantage les conditions de travail des professeurs ?
Le Grenelle de l’Éducation quant à lui, dévoile peu à peu son ambition, personne n’était dupe : la complète refonte du métier de professeur, à la sauce corvéable, peu formé, rémunéré au « mérite ».
Le ministre Blanquer continue de ne rien écouter, d’avancer tel un bulldozer. Il aura fallu l’annonce d’une grève sanitaire face à l’ampleur de l’épidémie, pour que le ministre concède des aménagements locaux, mais sans aucun cadrage national garantissant l’égalité des lycéens face à l’examen ou ParcourSup. Les collèges rencontrant pourtant les mêmes difficultés sanitaires ont pour leur part été ignorés par le ministre. Seul contre tous, il continue encore aujourd’hui de s’enfermer dans le refus d’un report en juin de l’ensemble des épreuves du bac et de leurs aménagements mettant ainsi en tension élèves et professeurs : dans quel but ?
Il est sans doute temps pour le ministre de remiser son égo. Il est sans doute temps de redonner aux instances de concertation leur rôle de dispute sur les projets et les idées, et de leur permettre aussi de trouver la voie, malgré les désaccords, vers un Service public d’Éducation qui n’évince pas les élèves, qui ne fragilise pas les plus fragiles d’entre eux, qui ne maltraite pas les personnels en niant leur professionnalité et en ne les rémunérant pas correctement.