La présentation lors du Comité Technique Ministériel du 4 novembre d’un décret relatif à « l’organisation et à la coordination interacadémique » revient sur les engagements pris par le Gouvernement en Conseil des Ministres le 31 juillet 2015. Les circonscriptions académiques créées sont menacées dans leur plein exercice, l’académie de Limoges risque d’être placée sous tutelle.
Le texte donne au Recteur de Bordeaux des prérogatives que ses collègues de Poitiers et Limoges n’auront pas et rattache auprès de lui les services ad hoc. Par ailleurs au-delà des compétences obligatoirement dévolues au Recteur de Bordeaux, les recteurs peuvent décider de politiques de mutualisations qu’ils jugeront utiles impliquant là encore la réorganisation des services déconcentrés.
Toutes ces mutualisations n’ont pas de caractère obligatoire, de même l’obligation de concertation entre les seuls recteurs est évoquée, mais qui peut croire que si l’ordre est donné par le Ministère, de procéder à des opérations de mutualisation (utiles dans le contexte budgétaire que l’on connait), les recteurs puissent refuser d’obtempérer ?
Ce texte ouvre donc une palette des possibles qui peut aller jusqu’à transformer le rectorat de Limoges en coquille vide en le privant de fait de ses principales prérogatives ou moyens.
Pour les personnels administratifs, cela signifie mobilités géographiques ou fonctionnelles, dégradations des conditions de travail, suppressions de postes.
Pour les usagers (parents, élèves, enseignants) cela signifie dégradation des services rendus par une administration de proximité ainsi qu’un éloignement des lieux de décisions, particulièrement en ce qui concerne la carte des formations, élément essentiel de l’aménagement de notre territoire. Ce projet de décret, dans un contexte de réduction des dépenses publiques, aura pour conséquence l’aggravation des inégalités qu’elles soient sociales ou territoriales, en éloignant les usagers, en particulier les plus fragilisés du service public d’éducation.
Ce projet de décret n’a reçu aucun vote favorable en CTM et a été rejeté par le CSE, si le Gouvernement prétend respecter le dialogue social, il doit l’entendre et retirer ce texte. La FSU s’est adressée aux élus et appelle à nouveau les personnels à la mobilisation. Combien de combats devrons-nous mener pour faire entendre au Gouvernement qu’il fait fausse route ?
En effet, la politique éducative menée depuis 2012, loin de marquer la rupture attendue par les personnels, se place dans la triste continuité des politiques menées par la droite. Certes des emplois sont programmés au budget et la formation des enseignants est rétablie. Les enveloppes attribuées n’ont pas suffi à rattraper les dégradations subies les années antérieures. Par ailleurs, les emplois d’enseignants ne trouvent pas tous preneurs, loin de là, quand les créations dans les autres corps font cruellement défaut. Les conditions de travail des personnels comme les conditions d’étude des élèves ne s’améliorent pas. La priorité à la jeunesse affichée un temps mérite mieux.
Les réformes sont imposées sans concertation et contre les personnels ; rythmes scolaires comme réforme du collège participent du délitement du Service Public d’Éducation en renvoyant au local les organisations voire les financements. Les mauvaises réformes du Bac Pro 3 ans ou Chatel du lycée ne sont pas interrogées et servent même de modèles alors que leurs effets néfastes se font aujourd’hui sentir sur les conditions d’accès et de réussite des élèves dans le supérieur. Elles ont permis des dizaines de milliers de suppressions d’emplois, est-ce aussi la vocation cachée de la réforme du collège ? L’autonomie, constamment mise en avant, n’est qu’un outil permettant surtout de renvoyer au local la gestion de la pénurie de moyens. La mise en concurrence systématique des établissements entre eux conduit à l’aggravation des inégalités. Cette conception de l’école basée sur la hiérarchisation des savoirs et la mise en concurrence entre les disciplines s’inscrit à l’inverse d’une école émancipatrice visant l’égalité et la réussite de tous. Désillusion et découragement sont les sentiments qui dominent aujourd’hui chez les personnels, nous ne cessons de le dire, comment croire à de possibles dynamiques dans ce contexte ?
Il y a aujourd’hui dans ce pays une urgence de plus d’État, dans tous les territoires. Pourtant les politiques menées actuellement conduisent toutes au morcellement et à l’affaiblissement de l’État. Les fractures qui traversent notre société nécessitent à l’évidence d’autres orientations. L’urgence est d’en débattre sérieusement, de mettre fin aux opérations de communication stériles et au mépris insupportable qui prévalent trop souvent.
1er décembre 2015