Nous sommes réunis ce jour pour débattre des conditions de préparation de la rentrée 2012. Lors des CTA du mois de janvier nous vous avons déjà indiqué que les retraits d’emplois dont était victime notre académie dans des proportions inédites, allaient gravement porter atteinte au service public d’éducation dans notre région et allaient conduire inéluctablement à des dégradations conséquentes des conditions d’études des jeunes celles-ci se cumulant aux dégradations des années précédentes. Nous entrons aujourd’hui, au travers de l’examen des mesures de carte scolaire programmées, dans le concret de ces dégradations.
Les collèges et les lycées de l’académie ont en effet reçu des dotations dont le mode de calcul va conduire à des classes plus chargées dans la totalité des établissements. C’est systématiquement sur la base de 30 élèves en collèges et de 35 en lycées que les dotations ont été calculées. Personne ne peut croire que de tels effectifs soient sans incidence sur la réussite scolaire des jeunes : ni les enseignants dont l’expérience de terrain fait chaque jour remonter les difficultés à travailler efficacement dans des classes très chargées, du fait des tensions qui apparaissent immanquablement, du fait de l’impossibilité d’individualiser leur enseignement quand c’est nécessaire, ni les élèves du fait des difficultés à se concentrer et à se mettre durablement en activité, ni les parents qui mesurent aussi la fatigue générée par des journées de cours qui se déroulent dans de telles conditions. Les quelques dispositifs d’aide aux élèves qui subsistaient sont eux mêmes rognés, comme l’ATP ou les itinéraires de découverte en collèges financés sur la base de 36 semaines. Les horaires réglementaires ne pourront pas être assurés partout, les dédoublements, notamment dans les disciplines expérimentales non plus. Que dire des bricolages auxquels en sont réduits certains établissements qui diminuent les horaires de cours pour financer une classe supplémentaire et donner un peu d’oxygène ? L’autonomie des établissements à laquelle vous ne cessez de renvoyer, se réduit de fait à la gestion locale de la pénurie.
Dans les lycées, l’application, au niveau des classes de terminales, de la réforme des lycées vous permet là encore de récupérer des moyens : tout est mis à profit, regroupement de filières dans les classes de premières et de terminales pour les enseignements du tronc commun, baisse des horaires disciplinaires. La réforme de la voie technologique, notamment industrielle, apparaît clairement comme un outil pour casser une voie qui avait pourtant permis à de nombreux jeunes d’accéder au bac et à des poursuites d’études. Certes ces formations avaient un coût, car elles reposaient sur des démarches de projet nécessitant des effectifs allégés. Mais nous réaffirmons qu’économiser sur la formation des jeunes est un non sens de courte vue. L’investissement dans la formation et l’accès aux qualifications sont pour nous incontournables pour préparer l’avenir, lutter contre le chômage et construire une société du vivre ensemble.
Si les conditions d’études des élèves vont continuer à se dégrader, les enseignants vont eux aussi subir une dégradation de leurs conditions de travail et d’emploi. Plus d’une vingtaine d’enseignants dans les collèges et les lycées vont être victimes d’une mesure de carte scolaire, déstabilisant tout leur environnement professionnel et personnel. Les réaffectations après mesures de carte scolaire seront difficiles, l’impossibilité de retrouver un poste fixe conforme à ses souhaits fréquente. N’oublions pas non plus les enseignants toujours plus nombreux qui seront contraints à effectuer un complément de service dans un (parfois deux) établissements. Où sont alors les espaces de travail collectif, d’échanges, si nécessaires dans nos professions ? Comment ne pas dénoncer enfin les situations dans lesquelles des postes sont supprimés alors même que des heures supplémentaires en nombre existent et montrent clairement que les besoins existent ?
Au total, c’est bien à un formidable gâchis auquel le service public d’éducation est confronté dans notre région comme dans le reste du territoire. Personne n’ignore ici le contexte politique dans lequel nous siégeons, les questions dont nous débattons ici sont débattues ailleurs. Sans vouloir anticiper sur ce qui sortira des urnes, ni sortir du rôle qui est le nôtre ici, nous dirons simplement que nous appelons de nos vœux une autre politique éducative, se donnant pour objectif de lutter résolument contre les inégalités et l’échec scolaires dont on sait qu’ils sont largement déterminées par le milieu social, et de développer l’accès pour tous les jeunes à des niveaux élevés de qualification. Certes, cette ambition a un coût. Mais ce coût est très largement à la portée de notre pays. Il n’est pas, contrairement à ce que l’on nous objecte, démesuré. Ce qui est démesuré par contre, c’est le coût social, culturel, économique de l’échec et de la sous- qualification. Voilà les idées que nous continuerons à porter quelque soit notre interlocuteur de demain.