Les annonces sur l’École se multiplient, chacune traçant une nouvelle priorité. Se dessine une École du passé que le président Macron met en avant au service de sa volonté de faire prétendument nation et d’opérer un réarmement civique de la jeunesse, alors qu’il ne cesse de fracturer la société. Rien pour répondre aux difficultés du terrain sur la question cruciale des effectifs par exemple, rien pour tracer la route d’un univers commun pour les jeunes, rien sur le rôle formateur et émancipateur de l’École par l’accès aux savoirs. La démocratisation scolaire, l’ambition d’accroître l’accès aux qualifications pour tou
Nous n’attendions rien du changement de ministre à la tête du ministère de l’Éducation nationale, tout juste espérions-nous un e ministre à temps plein compte tenu de l’état de l’École aujourd’hui. La prise de fonction de la nouvelle ministre, cumulant deux ministères, a quand même réussi à marquer les esprits de la pire des façons : propos méprisants pour l’École publique, mensonges, contournement de Parcoursup. Inutile d’en dire plus, elle s’est disqualifiée, nous avons bien compris qu’elle ne fera pas long feu, mais que cela importe peu puisque les décisions se prennent ailleurs que rue de Grenelle.
Sa feuille de route pour « relever le niveau des élèves » ne permettra pas de mieux faire réussir les élèves au collège. Généralisation des groupes de niveau, réhabilitation du redoublement, élèves fragiles privé es de la LVB, développement de l’intelligence artificielle, DNB barrière avant le lycée, classes prépa-lycée, nouveaux programmes, nouveau socle… cette avalanche de mesures marque un tournant pour le second degré dont les élèves et les personnels subiront les conséquences dès la prochaine rentrée et sur le long terme, mais peu importe, puisque viennent s’y ajouter des annonces médiatiques non financées (théâtre, EMC, histoire des arts…) alors que les services du rectorat ont déjà travaillé à la préparation de rentrée. C’est le travail de l’ensemble des personnels du ministère qui est méprisé par ce pouvoir politique qui n’a cure de l’intérêt général, qui n’a plus aucune boussole si ce n’est de courir après l’extrême-droite, comme en témoigne la loi immigration qui jetterait dans le dénuement certain es de nos élèves. Cette loi ne doit pas être promulguée.
Alors que les réformes Blanquer au lycée ont structuré le tri des élèves vers l’enseignement supérieur, les mesures pour le collège préfigurent un collège de la sélection dès la sixième pour décourager les plus fragiles de poursuivre leur scolarité vers l’une des trois voies du lycée. Cet éclatement du second degré mettrait fin aux progrès de démocratisation par les savoirs, privant une partie de la jeunesse d’un accès aux connaissances et aux qualifications. Les personnels, tout particulièrement en collège, seraient réduits à se conformer à de prétendues bonnes pratiques guidées par des batteries d’évaluations standardisées et des applications pilotées par une intelligence artificielle. Ces nouvelles pratiques professionnelles neutraliseraient la liberté pédagogique. Elles sont en tout point cohérentes avec la réforme de la formation initiale que nous contestons car elle fragilise la dimension universitaire de la formation des enseignant es. Les enseignant es du Second degré ne peuvent pas être recruté es en cours de licence.
Sur la question budgétaire, le SNES-FSU condamne l’opération « schéma d’emplois » visant à neutraliser des suppressions d’emplois prévu es à la rentrée 2024. Ce sont bien 28 emplois qui disparaissent du plafond d’emplois de notre académie dans le second degré, portant à 136 le nombre d’emplois supprimés depuis 2018. Les documents du CSA affichent une compensation de ces suppressions et des moyens réinjectés dans les DGH. Il reste que ces moyens d’enseignement sont provisoires et annuels, comme ceux reçus l’an dernier et qui ne sont pas reconduits. L’opération blanche que vous nous présentez revient en fait à faire vivre à crédit notre académie, avec une dette qu’il faudra rendre ! Les moyens de suppléance sont à nouveau réduits, 30 emplois en deux ans, pour tenir le budget. Le tout, pour mal mettre en œuvre de mauvaises réformes : des groupes de niveau en Sixième et Cinquième et la préfiguration des Secondes prépa-lycée. En plus d’aller à l’encontre de toutes les études qui condamnent la différenciation structurelle tant elle fige voire accroît les inégalités scolaires et sociales, les conditions de travail des personnels vont encore être dégradées par des alignements de séances, des mises en barrettes sur plus d’un tiers des heures, des groupes classes éclatés dès la Sixième. Les effectifs élèves resteront trop chargés en collège comme en lycée et continueront à peser lourdement sur les conditions d’études des élèves et de travail des personnels. Les deux suppressions d’emplois de CPE sont incompréhensibles compte tenu de l’état de nos vies scolaires, mais elles illustrent sans doute la priorité à la lutte contre le harcèlement.
Le SNES-FSU revendique que les moyens soient mis dans les classes pour réduire les effectifs, ce qui améliorerait aussi les conditions de l’école inclusive. Respecter et revaloriser les personnels, engager un nouvel élan de démocratisation en portant la scolarité obligatoire à 18 ans, favoriser et faciliter les poursuites d’études dans le supérieur pour le plus grand nombre d’élèves : pour le SNES et la FSU, une autre école est possible ! Démocratiser l’École pour élever les qualifications de toute la population, c’est rendre les savoirs les plus exigeants accessibles à toute une génération en augmentant le temps d’études, en repensant les programmes scolaires, en redonnant la main aux personnels avec une formation initiale et continue de qualité pour des pratiques professionnelles réellement démocratisantes. La politique éducative menée va dans le sens d’une École du tri scolaire et social, à l’opposé de notre projet éducatif démocratique. Voilà pourquoi nous serons en grève le jeudi premier février.
22 janvier 2024