Nous voulons en ce début de CSA exprimer nos inquiétudes quant à la politique menée par la ministre Borne en ciblant différents points.
Si la tranquillité scolaire est un aspect de la vie des établissements que personne ne prend à la légère, l’annonce de fouilles préventives par les forces de l’ordre, à l’entrée des établissements, nous semble aller à l’encontre de l’objectif recherché, à moins qu’il s’agisse de flatter l’électorat d’extrême-droite. Nous demandons évidemment que de telles mesures ne soient pas mises en œuvre dans notre académie.
Suite aux révélations des actes sordides commis en masse à Notre Dame de Bétharram, la ministre a annoncé un renforcement des contrôles dans les établissements privés sous contrat. Outre que l’on ne cesse de s’étonner de la quasi absence de contrôle des établissements privés, en moyenne une fois tous les cent-quarante ans, nous nous interrogeons sur l’effectivité de cette annonce -qu’est-ce qu’un contrôle en distanciel ?- et surtout sur les décisions qui pourraient en découler. Le tristement célèbre collège-lycée Stanislas, dont les dérives, dans d’autres aspects qu’à Betharram mais tout aussi inacceptables, sont largement documentées, ne voit pas son contrat d’association avec l’État remis en cause. L’enseignement privé semble hors de contrôle dans ce pays, il est pourtant financé par des milliards d’argent public. Nous le redisons, l’argent public doit aller à l’École publique. Si des familles veulent pratiquer le séparatisme scolaire, qu’elles en assument l’intégralité des coûts.
Par ailleurs, la ministre a présenté un projet d’épreuve de mathématiques en classe de Première, celui-ci relève tout d’abord très largement du gadget, sans doute pour ne pas déjuger Gabriel Attal qui l’avait décidé seul, mais relève surtout du mépris pour le travail des professeurs de mathématiques. Quel est en effet le sens d’une épreuve, certes terminale et anonyme ce qui est préférable au contrôle continu, mais dotée d’un coefficient deux sur cent ? Qui imagine sérieusement que les lycéen nes vont s’emparer de cet enjeu ? Tout le monde mesure en revanche la logistique nécessaire à la passation de ces épreuves, tout-ça pour ça serait t’on tenté de dire ! Le bac Blanquer n’en finit pas d’être retouché, ce qui est bien la démonstration d’un objet mal-né, imposé contre l’avis de l’ensemble des acteurs trices de l’Éducation par le dogmatique J-M Blanquer. L’épreuve du grand oral n’a par ailleurs plus aucun sens compte tenu de la percée des I.A. génératives, là-encore quel mépris pour les examinateurs.
En ce qui concerne justement les I.A., le plan annoncé par la ministre inquiète très largement. Développement d’une I.A. souveraine dans l’Éducation nationale, pour quoi faire ? Développer un chatbot permettant de renseigner les agent es ? Les services du rectorat apprécieront ! Décharger les professeur es de tâches à faible valeur ajoutée ? Lesquelles ? Rappelons que l’évaluation, sa conception comme sa correction, fait partie intégrante de l’acte d’enseignement. Comment mesurer, si les enseignant es en était privé es, les progrès ou difficultés des élèves, les moyens d’y remédier ? S’il s’agit de chercher un moyen d’augmenter le temps de travail des enseignant es, nous le disons tout de suite, c’est non !
Le développement sans frein des I.A., sans qu’en soient jamais interrogés les tenants et objectifs, est certes une problématique en éducation -la triche se développe, le sens du travail personnel à la maison est interrogé...-, mais plutôt que d’y plonger tête baissée, il faut trouver les moyens de maintenir une qualité et une exigence des enseignements qui permettent à chaque jeune d’atteindre son émancipation intellectuelle. L’immédiateté des réponses, y compris erronées, des I.A. est un frein évident à l’accomplissement de cet objectif pourtant premier de l’École.
Enfin concernant la poursuite du choc des savoirs, les projets de programmes de langues vivantes sont largement rejetés par les collègues, tout comme leur déploiement sur l’ensemble des niveaux à la rentrée 2025. Cette alerte sera-t-elle une fois de plus ignorée et les collègues seront-iels une fois de plus soumis
es à une maltraitance institutionnelle ? Quant à l’organisation des enseignements en collège, aucun texte n’est encore paru après le rejet unanime de la nouvelle organisation présentée en CSE. Une fois encore la rentrée se prépare sans texte, sur la base d’annonces médiatiques. Cela ne fait qu’entretenir la très forte défiance qui règne dans les salles des professeurs alors que les moyens manquent par ailleurs cruellement.En ce qui concerne l’ordre du jour, si nous pouvons reconnaître que les services de la DOS ont travaillé finement, il n’en reste pas moins que ce travail résulte d’une dotation négative pour l’académie. Ainsi, dans les collèges et lycées les dédoublements partout disparaissent ou se réduisent, les regroupements d’élèves en langues ou options seront bientôt généralisés, les effectifs dans les classes en lycée et collège, notamment urbains, ne permettent pas une individualisation et une différenciation pourtant prônée par l’institution, la technologie est une discipline particulièrement sinistrée par les différentes réformes menées depuis dix ans. C’est à ce prix que les établissements tiennent la contrainte budgétaire qui leur est imposée. C’est le découragement et la désillusion qui dominent en salle des professeur
es, ce qui n’est jamais bon pour l’engagement des équipes et la vitalité dont elles doivent faire preuve pour accompagner les jeunes dans un monde incertain et parfois anxiogène. Ces équipes ont donc besoin d’être renforcées et stabilisées. Ainsi partout où les moyens le permettent, le maintien ou l’implantation d’un poste doit être effectif, ce CSAA doit être l’occasion de le concrétiser. Nous voulons aussi vous alerter sur le développement de demandes de postes spécifiques émanant de chef fes d’établissement ou d’IPR, pressé es de choisir « leurs » enseignant es, encouragées sans doute par les déclarations de la ministre Borne, pour laquelle le barème de mutation « générerait des frustrations ». Nous notons avec satisfaction que vous ne donnez pas suite à certaines de ces demandes, cependant le développement, voire la généralisation, de postes à profil que la ministre semble vouloir promouvoir pour le mouvement 2026 générerait lui à coup sûr de la colère, le Service public d’Éducation, nos salles des professeur es, n’en ont pas besoin !