Madame la Rectrice,
La promesse présidentielle d’une revalorisation inconditionnelle de 10% de tous les enseignants dès janvier 2023 a fait pschitt. Le ministère enchaîne les réunions sans rien annoncer, sinon son projet de faire travailler davantage les professeurs, qui travaillent déjà 43 heures par semaine, qui travaillent davantage, qui ont déjà davantage d’élèves dans leurs classes et des salaires plus faibles que leurs homologues européens. Ce mépris est insupportable et irresponsable compte tenu de la gravité de la crise de recrutement. Le SNES-FSU exige une augmentation de 10% de toutes et tous, sans contreparties et la programmation d’un plan de rattrapage des 15 à 20% des pertes de pouvoir d’achat de ces 20 dernières années.
La poursuite des suppressions d’emplois est à l’ordre du jour de cette instance, alors que la Depp démontre que les conditions d’encadrement en France sont bien moins bonnes que dans le reste de l’union européenne (21 élèves en moyenne dans une classe de collège en Europe, contre 24,4 dans notre académie par exemple), quelles perspectives d’amélioration peuvent ainsi se dessiner ? Les effectifs d’élèves de 2007 et 2023 dans le second degré sont quasi identiques (à 37 près), pourtant 528 emplois de professeurs auront été supprimés dans l’intervalle ! Les performances du système éducatif -régulièrement décriées !- sont sans doute à interroger au vu de cet indicateur. Les dispositifs hors-sol dévoilés par note de service et interview médiatiques ne visent qu’à masquer ce sous encadrement de nos élèves. Ils ne permettront pas la prise en charge de la difficulté scolaire au sein de la classe, alors que c’est le lieu où elle est efficace. Nous attendons, Madame la Rectrice, que vous nous expliquiez comment peut se mettre en place l’heure de remédiation ou de renforcement en 6e, pour tous les élèves, en groupes comme l’annonce le Ministre, en sessions transversales aux programmes très cadrés et aux intervenants très divers, dont personne aujourd’hui ne peut garantir la disponibilité. Quelle est cette nouvelle usine à gaz de nature à déstabiliser l’organisation des classes et des collèges ? L’annonce de la suppression de la technologie qui l’accompagne est scandaleuse tout comme la proposition de confier aux professeurs de technologie concernés les heures de soutien en mathématiques. Quel manque de respect pour nos collègues qui vont voir leurs compléments de service augmenter, leurs qualifications disciplinaires méprisées, alors que ces éléments sont déjà facteurs d’une souffrance au travail très importante dans cette discipline. Le SNES-FSU exige qu’aucun poste de technologie ne soit supprimé si les annonces ministérielles étaient confirmées. Dans l’attente, c’est l’arrêté collège qui fait loi et les TRMD doivent être examinés dans ce cadre réglementaire. Le projet de consacrer une demi-journée par semaine en 5e à la découverte du monde professionnel dès la rentrée 2023 est tout aussi hors-sol : quel bénéfice pour les élèves, à la place de quels enseignements serait-elle organisée ?
Le SNES-FSU demande que le temps soit donné à la concertation, inexistante à ce jour, pour des évolutions d’organisation au collège. Il n’est pas possible, sans mettre le système tout entier en tension d’aller vers de telles évolutions pour la rentrée 2023.
La réforme du lycée, imposée à la hâte et au forceps, remaniée plus de 20 fois, devrait servir de contre-exemple à quiconque veut conduire une réforme de progrès avec les personnels chargés de la mettre en œuvre. A moins qu’il ne s’agisse une fois encore de maltraiter élèves et personnels ?
La réintroduction très insuffisante des mathématiques en première générale ne règle rien, elle risque au contraire de fragiliser la spécialité mathématiques, à l’encontre des besoins de formation du Pays, et son articulation avec maths complémentaires en Terminale reste à construire faute de programmes cohérents. Le maintien, contre l’avis unanime du CSE, des épreuves de spécialité en mars est purement idéologique, les établissements du supérieur n’en sont pas demandeurs. La qualité de la formation en est très fortement impactée en Terminale (course après le temps, aucun temps d’approfondissement, relation pédagogique abîmée). Il est encore temps de repousser ces épreuves en juin. Le vademecum sur l’organisation du troisième trimestre de Terminale a été reçu comme une véritable provocation par les professeurs tant il décrit une réalité alternative à celle vécue dans les lycées. Le déni ne fait pas une politique éducative.
D’autres chantiers seraient pourtant à entreprendre, le SNES-FSU s’est déjà exprimé sur cette question en décembre : la question de la mixité scolaire doit être prise à bras le corps, avec courage. La publication des IPS des collèges et lycées de l’académie, démontre comme ailleurs, une forte ségrégation sociale. Sur des villes où les transports en commun sont développés et les distances faibles, la puissance publique a les moyens d’apporter des corrections pour mettre fin à ce séparatisme social dans l’enseignement public comme dans l’enseignement privé. En zone rurale c’est par l’attribution de moyens supplémentaires que les difficultés peuvent être surmontées. Des actes seront-ils posés ?
Dégradation continuelle des conditions de travail, faiblesse des salaires, remise en cause de la professionnalité, perspectives inacceptables d’une retraite à 64, 65, 66 ou 67 ans, conduisent les personnels au ras-le-bol et au découragement, nos métiers n’attirent plus. Pourtant les mêmes politiques idéologiques sont mises en œuvre, avec brutalité. Pensez-vous Madame la Rectrice que les professeurs, les personnels, le Service public d’Éducation vont mieux aujourd’hui qu’à votre arrivée à la tête de cette académie ?