CONFERENCE DE PRESSE de rentrée SNES-FSU : 30 août 2016
Le second degré en grève dès la rentrée le jeudi 8 septembre
Les questions éducatives ont toujours eu une importance décisive, c’est encore plus le cas alors que notre pays traverse une grave crise sociale. Le système éducatif est un lieu où se construit la société de demain où les jeunes partagent des valeurs et des apprentissages communs en plus d’acquérir des qualifications.
Or, alors que se profile la dernière rentrée du quinquennat de François Hollande, il est clair qu’il n’aura répondu ni aux besoins du système éducatif ni aux attentes des personnels. Un rappel est éclairant : pendant le quinquennat Sarkozy, l’académie de Limoges a perdu dans le seul second degré, 500 emplois. Et alors qu’aujourd’hui l’académie retrouve des effectifs supérieurs à ceux de la rentrée 2008 seuls 50 emplois auront été rétablis à la rentrée 2016. Les conditions d’encadrement sont restées tout aussi détestables en collège comme en lycée. Et même si les performances affichées en termes d’accès au baccalauréat restent bonnes, de plus en plus d’élèves sont en situation de fragilité importante dans les acquisitions de connaissances comme dans la maîtrise d’une réflexion autonome et critique. Il est dangereux de parier, comme c’est le cas actuellement, que cette situation pourra perdurer sans dommage. Si l’on y ajoute l’imposition de réformes contestées par les personnels car elles conduisent à une dégradation du service public d’éducation et à un renoncement à une formation ambitieuse pour tous les élèves, que ce soit au collège avec la réforme Vallaud Belkacem, ou au lycée dans lequel le bilan de la réforme Chatel n’est toujours pas effectif, le quinquennat Hollande restera celui d’une occasion manquée pour le système éducatif comme pour les enseignants. Voilà les raisons qui fondent notre appel à la grève pour le jeudi 8 septembre. Il est de notre responsabilité de faire entendre que le système éducatif a un rôle majeur à jouer dans la formation des jeunes et des futurs citoyens et qu’il ne peut le faire que très imparfaitement aujourd’hui.
Un renoncement à l’ambition pour tous les jeunes
La rentrée s’annonce difficile en collège – où se met en place la réforme Vallaud Belkacem sur les 4 niveaux - mais aussi en lycée dans un contexte de tensions fortes sur les effectifs dans les classes. Mais au delà de ces tensions fortes qui se répètent depuis de trop nombreuses années, nous voulons dénoncer le remodelage du système éducatif qui est entrain de s’opérer. Si l’on conjugue mise en place de la réforme du collège, maintien de la réforme Chatel au lycée, quasi disparition des redoublements, nouvelles modalités d’évaluation des élèves ce sont les objectifs assignés au système éducatif qui sont entrain de bouger insidieusement. En effet, si dans les années 80, le système éducatif a connu de fortes dynamiques alliant élargissement de l’accès au lycée et au bac, démocratisation et ambition dans les contenus de formation, les choix opérés depuis quelques années marquent le renoncement à ces objectifs. Au collège comme au lycée, l’acquisition de savoirs construits, ambitieux, émancipateurs, tout comme la consolidation et l’élargissement des qualifications de tous les jeunes ne sont plus prioritaires. De même, la lutte contre les inégalités scolaires et les déterminismes sociaux est menacée du fait notamment de l’autonomie renforcée des établissements qui va conduire à l’éclatement d’un certain nombre de repères nationaux. L’Education Nationale se donne maintenant l’objectif de gérer des flux, la fameuse fluidité des parcours dont on nous rebat les oreilles, à moindre coût.
La réforme Vallaud - Belkacem du collège, outre une complexification forte de l’organisation scolaire qu’elle induit, ne permettra aucunement de répondre aux difficultés actuelles du collège. Elle diminue les horaires élèves et les horaires disciplinaires, elle évacue la question de la baisse de nombre d’élèves par classe, elle ne permettra pas aux élèves en difficultés de les surmonter ni d’entrer dans les apprentissages. Les « nouveautés » que sont l’AP et les EPI n’auront pas les moyens de fonctionner dans des conditions satisfaisantes et ne pourront s’attaquer au noyau dur de l’échec scolaire caractérisé par une rupture des apprentissages, une perte de sens, l’impossibilité à se projeter dans une véritable démarche intellectuelle…Evaluation « bienveillante » et passage automatique en classe supérieure viennent compléter le tableau pour dessiner un collège qui se satisfait d’accompagner les jeunes, d’épouser leurs difficultés mais sans chercher à y remédier.
Quant au lycée, il reste englué dans la réforme Chatel. Et l’on comprend mieux le refus de la ministre de rouvrir le chantier de la réforme du lycée quand on mesure à quel point les fondamentaux de la réforme du collège sont proches de ceux déjà mis en œuvre dans le lycée Chatel : autonomie renforcée - mais de façade car tous les « choix » sont guidés par la contrainte budgétaire et non par des considérations pédagogiques-, baisse des horaires disciplinaires, effectifs pléthoriques, AP gadget trop souvent inopérant du fait de ses modalités, séries technologiques dénaturées et en perte de vitesse…Dans de telles conditions, trop de jeunes lycéens survolent les apprentissages et « traversent » leur scolarité au lycée sans véritablement acquérir ni consolider savoirs, méthodes de travail, autonomie. Que le taux de réussite au baccalauréat se maintienne à un niveau élevé ne doit pas faire illusion. D’abord il peut baisser dans les années à venir et par ailleurs, les difficultés des jeunes et les fragilités des apprentissages se révèlent de façon particulièrement préoccupante notamment lors de la première année de post bac.
La rentrée dans l’académie de Limoges : quelques éléments saillants
La rentrée 2016 se caractérise une nouvelle fois par la hausse des effectifs d’élèves : +68 dans les collèges et surtout +592 dans les lycées généraux et technologiques. Les prévisions pour 2017 pointent les mêmes dynamiques. En juin 6 classes supplémentaires ont été ouvertes en collège ce qui laisse à penser que la hausse sera supérieure à l’estimation.
Pour faire face des moyens nouveaux ont été injectés dans les établissements : 20 emplois supplémentaires en collège et 38 en lycée. Dans un contexte de forte contestation de la réforme du collège le Recteur a fait le choix de ne pas mettre en œuvre la récupération de moyens qu’elle permet et des dotations complémentaires ont ainsi été alloués aux établissements, leur pérennité n’est aucunement garantie, personne n’est dupe de la manœuvre. Dans le même temps la forte hausse des effectifs en lycée ne pouvait être absorbée sans dégradations nouvelles avec la dotation ministérielle de 30 emplois. Le Recteur a donc réinjecté 28 emplois jusque-là dévolus aux suppléances dans les établissements. C’est ainsi qu’il parvient à ne pas dégrader encore les taux d’encadrement sans qu’aucune amélioration ne se profile dans les établissements. Il ne peut en être autrement, sur les 500 emplois supprimés entre 2008 et 2012 seulement 50 ont été rétablis jusqu’à présent.
Persistance aussi, et même aggravation, des difficultés de remplacements puisqu’au 1er septembre plus aucun TZR ou presque n’est disponible !
La réforme du collège a pour conséquence la suppression de 16 classes bilangues sur les 41 existantes en 2015. L’enseignement des langues anciennes a aussi été mis à mal : l’option latin ou grec étant remplacée par un enseignement complémentaire à l’horaire réduit ou des EPI au contenu vague.
En ce qui concerne les manuels scolaires en collège en lien avec la réforme des programmes des 4 niveaux, si la Ministre a aussi beaucoup communiqué sur ce sujet, les crédits alloués aux établissements sont très loin de permettre l’équipement des élèves (pour rappel tous les élèves devaient être dotés d’un manuel en Français, Histoire-géo, mathématiques, les élèves de 6e en sciences et les élèves de 5e en LV2). La précipitation de la mise en place de la réforme et des nouveaux programmes, les 4 niveaux la même année, place donc les élèves et les enseignants dans une grande difficulté. Autre exemple 10 postes d’espagnol n’ont pu être pourvus lors du mouvement des enseignants faute de personnels recrutés en nombre suffisant… Loin d’une réforme pédagogique, nous avons affaire à une réforme politique qui s’inscrit dans le temps du calendrier électoral.
De même en ce qui concerne les « collèges numériques » dont la mise en place se fait sans les personnels qui ne sont même pas informés ! Les Conseils Départementaux devant financer le matériel semblent par ailleurs rechigner à la dépense. Là encore un exemple du décalage entre le discours ministériel et la réalité.