La fin de cette année scolaire est éreintante, les personnels vivent des situations professionnelles difficiles, les tensions dans les établissements atteignent des niveaux inégalés. Si la situation sanitaire n’est pas étrangère à cette situation, c’est aussi l’ensemble de la politique éducative menée qui en est à l’origine. Dans l’Éducation nationale, la mise en œuvre de la réforme du lycée, dont nous n’avons cessé de dénoncer les reculs qu’elle induit, tant pour les contenus de formations que pour le bac, a conduit à une multiplication des difficultés et à une mise en tension de l’ensemble des acteurs. Les consignes tardives et contradictoires qui se sont empilées n’ont pas permis un travail serein ni pour les enseignants ni pour les élèves. Le maintien du grand oral, dont les contenus sont mal définis et dont la préparation a été quasi impossible, relève d’un entêtement idéologique irresponsable du ministre. Quant au DNB, le ministre l’ignore totalement alors même que l’année scolaire perturbée rendait nécessaire des aménagements. Concernant les enseignants convoqués pour corriger des écrits ou faire passer des oraux, nous dénonçons la légèreté inacceptable avec laquelle ils ont été traités. L’envoi tardif des convocations a empêché de trop nombreux personnels d’anticiper pour réussir à concilier, sans stress majeur, les impératifs de la vie professionnelle et de la vie personnelle. Les conditions de correction sont souvent intenables si l’on prend en compte le nombre de copies dévolues et les délais impartis. C’est tout particulièrement le cas en philosophie et en français. Que dire des situations dans lesquelles les collègues sont obligés de se battre pour ne pas assurer leurs cours pendant les corrections comme si cela n’allait pas de soi ? Que dire des situations dans lesquelles les enseignants doivent cumuler correction de copies et interrogations pour le grand oral ? Que dire du choix du Ministre pour l’épreuve de philosophie qui dévalorise l’examen et méprise le travail des correcteurs ? Est-ce ainsi que l’institution manie la bienveillance tant vantée par ailleurs dans la politique RH affichée ?
Les personnels qui étaient concernés par une demande de mutation à l’intra viennent de découvrir leur affectation sans avoir d’éléments leur permettant d’en comprendre les raisons ou tout simplement d’en vérifier la justesse du fait de la publication du seul résultat de mutation, sans rang de vœu obtenu ni barème ayant permis la mutation. C’est la même chose pour la hors classe avec la seule publication d’un tableau d’avancement sans aucune barre de promotion. La disparition des instances paritaires est génératrice d’une perte de confiance dans l’institution et plus globalement d’un sentiment de fragilisation des personnels. Est-ce cela la relation RH de proximité mise en avant par le Ministre ?
Les annonces du Grenelle sont très insuffisantes pour ce qui est du volet financier. Nous dénonçons une opération de communication annonçant une revalorisation significative de 700 millions qui est un leurre puisqu’elle recouvre des mesures déjà actées par ailleurs et des mesures communes à l’ensemble des fonctionnaires comme la prise en charge d’une partie de la protection sociale complémentaire, mesure qui fait par ailleurs courir à très court terme des risques pour le modèle mutualiste. Seuls 145 millions seraient finalement consacrés à de nouvelles mesures indemnitaires pour le début de carrière : ces annonces ne sont pas à la hauteur du déclassement salarial des personnels du second degré, qui est pourtant un des facteurs du manque d’attractivité de nos professions. L’idée d’une loi de programmation pluriannuelle est enterrée. Est-ce ainsi que le Ministre entend reconnaître l’engagement professionnel de tous les enseignants ?
Les annonces sur le métier relèvent quant à elles de projets dangereux. La mise en avant du développement de hiérarchies intermédiaires en appui des personnels de direction, eux-mêmes encouragés à l’interventionnisme, par exemple dans le domaine pédagogique, laisse présager une dénaturation profonde de nos métiers et la multiplication de tensions dans les établissements. L’utilisation d’heures supplémentaires ou du numérique pour le remplacement ne répond pas aux enjeux de continuité du service public d’Education, qui passe nécessairement par des recrutements supplémentaires et l’annulation des suppressions de postes prévues pour la rentrée 2021. Enfin, l’accent mis sur l’autonomie accrue des établissements dessine les contours d’un système éducatif toujours plus concurrentiel. Est-ce ainsi que le Ministre entend renforcer la confiance des personnels dans l’institution ?
Le Snes-FSU rappelle ses demandes : une réelle revalorisation, sans contreparties, qui passe par le dégel de la valeur du point d’indice, la reconstruction des grilles et la revalorisation immédiate notamment pour les débuts de carrière. Il est temps que le Ministre entende ce que les personnels veulent pour le service public d’Éducation du 21e siècle : un service public renforcé, avec des moyens, avec de bonnes conditions de travail et non de l’affichage sur la qualité de vie au travail, avec des personnels respectés et revalorisés.
Nous sommes réunis aujourd’hui en CAPA pour examiner, pour la dernière fois, l’avancement accéléré. Un an après la fin du paritarisme, chacun mesure bien à quel point les opérations de carrière ont perdu en transparence et en lisibilité pour les collègues comme pour les élu.e.s des personnels. Isoler, individualiser la gestion des carrières, les soustraire au regard des élu.e.s des personnels, et même au final au regard des personnels concernés eux-mêmes, tel était bien l’objectif idéologique de la loi de Transformation de la Fonction Publique. Le SNES ne saurait s’y résoudre et réaffirme sa détermination à défendre les valeurs de solidarité collective, les missions du Service public d’Éducation et la démocratie sociale.