16 octobre 2024

Action et actualités

Déclaration de la FSU au CDEN du 8 octobre 2024

Déclaration de la FSU CDEN du 08.10.2024
Mr le Préfet, MR le Directeur Académique, Mr le Président du Conseil Départemental, Mesdames et Messieurs les membres du CDEN

Les urnes, ont parlé. Le résultat des élections législatives anticipées est clair : la majorité de la population a fait barrage à l’inquiétante ascension de l’extrême droite raciste et xénophobe, héritière du fascisme d’hier, ennemie du monde du travail d’aujourd’hui et fossoyeuse annoncée des services publics. Elle a également rejeté la politique menée depuis 7 ans qui assèche les recettes de l’Etat et met en péril le financement des Services Publics dont nous avons tant besoin.
Mais en refusant le choix des urnes, le président de la République aura attendu 52 jours pour nommer un premier ministre ! Michel Barnier, issu des LR, parti n’ayant remporté que 62 sièges à l’Assemblée nationale, est devenu premier ministre avec l’accord tacite du R.N qui a joué de fait le rôle d’arbitre dans sa nomination.
A l’heure où s’ouvre ce CDEN de rentrée le Président de la République a donc persisté dans un déni de démocratie à ignorer non seulement le résultat des législatives, mais aussi la mobilisation citoyenne.
Personnels et élèves ont fait une rentrée dans un certain brouillard, sans texte de cadrage, dans le plus grand des flous quand à la mise en œuvre de certaines mesures voulues par le gouvernement « démissionnaire ».
A la rentrée la ministre démissionnaire a affirmé que tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes, qu’il y avait un enseignant devant chaque élève, que les groupes dits désormais de "besoin" fonctionnaient et que les cours d’empathie ou la pause numérique allaient tout résoudre... Elle a aussi défendu la continuité de la politique éducative désavouée par l’ensemble des organisations syndicales et rejetée en Conseil supérieur de l’Education.
Aujourd’hui quel espoir pouvons-nous avoir d’une nouvelle ministre, la quatrième en quatre ans, Mme Gennetet, choisie pour assurer la continuité d’une politique désavouée, une ministre qui affirme en terme de carte de visite, avoir toutes les compétences puisque ayant été à l’école et ayant des enfants ?
Quel espoir également avec Alexandre Portier, ministre délégué à la Réussite scolaire et à l’Enseignement professionnel, qui s’est surtout illustré par ses tribunes dans le Figaro ou le JDD pour défendre l’enseignement privé ou nier la ségrégation scolaire, qui serait un terme propre au « wokisme » ?
Dans ce contexte aucune revalorisation des salaires n’est envisagée, et les politiques d’austérité budgétaire s’accentuent. Le premier ministre s’est contenté d’annoncer quelques toilettages de la politique de l’offre menée depuis 2017. Il a indiqué vouloir mettre à contribution de manière exceptionnelle les contribuables les plus riches et « les grandes et très grandes entreprises qui réalisent des profits importants ». Mais « en même temps », il a presque ajouté que le « premier remède » au déficit sera toujours la réduction des dépenses. Révélateur et irresponsable quand on connaît le rôle social de la dépense publique ! De nombreuses possibilités de nouvelles recettes fiscales pérennes existent pourtant et permettraient un retour de la progressivité de l’impôt en taxant à leur juste hauteur les revenus du capital et les supers héritages, en prenant en compte l’empreinte carbone ou encore en taxant les superprofits des grandes entreprises.
Pas un mot non plus du premier ministre concernant la valeur du point d’indice ou l’amélioration des carrières. Dès lors, les discours sur la proximité des services publics et sur la "politique de l’évaluation" révèlent le retour d’idées bien connues comme l’accroissement de la pression mise sur les personnels. Ces politiques ont pourtant fait la preuve de leur nocivité pour les services publics et les agents. Michel Barnier s’est même lancé dans le grand concours des idées absurdes, comme par exemple, le recours à des enseignant⋅es retraité⋅es pour assurer les remplacements ou le tutorat des jeunes enseignants. Et pourtant, l’Education nationale aurait besoin de plus d’ambition, de plus de reconnaissance et de valorisation !
La FSU s’inquiète aussi des hypothèses du ministère des finances qui entend profiter de la baisse démographique afin de faire de nouvelles économies. Dans le cadre de l’exercice des revues des dépenses, une mission de l’Inspection générale des Finances et l’Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche envisage une suppression massive des emplois et des structures scolaires. Jusqu’à 2 359 classes dans le premier degré et 1 400 en collège pourraient être supprimées : 1 800 ETP seraient menacés en lycée ; 1 925 écoles et 33 collèges pourraient être fermés. Cela ne conduirait qu’à affaiblir davantage le service public d’Éducation. En sept années de rentrées préparées sous la présidence d’Emmanuel Macron, 8865 emplois d’enseignantes ont été supprimés dans le second degré public pour 7 441 élèves en plus. Il faudrait au contraire créer des postes soit 10 617 emplois pour retrouver le taux d’encadrement de 2017 dans le second degré. Dans notre département, certains collèges ont accueilli en cette rentrée des classes à 30 élèves. Les effectifs en élémentaire ou au collège font de notre pays l’un des derniers de l’Union Européenne, 22 en moyenne contre 19 dans le 1er degré, 26 contre 21 en collège... tout est dit.
Non, tout ne va donc pas bien dans le meilleur des mondes. Le Service Public d’Education craque de partout, les inégalités se creusent, les moyens manquent, les personnels n’en peuvent plus des réformes destructrices qui se succèdent. Ils ont le sentiment légitime de devoir tenir le système à bout de bras sans reconnaissance en particulier salariale.
Doit-on relever encore que les manques de personnels perdurent ? Oui il manque aujourd’hui des professeur.es ou des AED dans les collèges du département, comme dans les lycées généraux, technologiques et professionnels, des enseignants dans le 1er degré pour aider les enfants en difficultés. Il manque des remplaçants. La crise du recrutement s’accentue.
Ajoutons à ce sombre constat de rentrée la situation, inadmissible, de l’école inclusive dans notre département. De nombreux élèves ayant obtenu une notification d’accompagnement sur le temps scolaire par la MDPH n’ont pour certains aucune prise en charge et pour les autres une prise en charge qui ne respecte pas les quotités stipulées par la MDPH. Les AESH demeurent en grande précarité, elles et ils n’ont toujours pas de statut et pour palier le manque de recrutement, leur emploi du temps est morcelé en de multiples accompagnements qui n’aboutit qu’à dégrader la qualité de leur suivi.
Ajoutons aussi que depuis le 1er avril 2024, notre département n’a plus de médecin scolaire et qu’il n’y a plus aucun RASED complet pour aider à la prise en charge de la difficulté scolaire au sein des écoles.
A la politique de « choc des savoirs » il faut substituer une politique de choc des moyens. Nos professions se sont d’ailleurs opposées aux mesures de tri social qui avait été pensée par l’alors ministre Gabriel Attal. La mise en place chaotique des groupes de français et de mathématiques en sixième et en cinquième, sur un tiers des emplois du temps des élèves, ont impliqué dans de nombreux collèges la disparition d’heures à effectifs réduits dans les autres disciplines que le français ou les mathématiques. Ils ont rendu plus compliqué la constitution d’emplois du temps dégradés. Ils font toujours courir le risque de stigmatiser les élèves les plus en difficulté.
C’est la mobilisation de nos collègues qui a permis dans de nombreux établissement de limiter l’impact d’une réforme de tri scolaire et social. Dans 64,5 % des collèges en France, les groupes de niveau, tels que les a imaginés l’ancien Premier ministre, ne sont pas mis en œuvre. Nous continuons de demander l’abrogation de cette réforme.
Que dire des évaluations standardisées dans le 1er degré, que la FSU dénonce, évaluations chronophages et inutiles qui nient le professionnalisme des professeurs et leurs capacités à concevoir et mettre en place des outils adaptés ? Ces évaluations ne sont que l’expression du désir de destituer les enseignantes et les enseignants de leur rôle de concepteur et de mettre à mal la liberté pédagogique. Evaluer avec des outils inadaptés, labelliser les manuels, pratiquer précocement le tri social des élèves sont des pratiques brutales orchestrées par nos dirigeants et dont la nocivité a déjà été démontré.
Que dire également sinon que les mots devraient avoir un sens lorsque la ministre évoque le lycée professionnel comme une « voie d’excellence » ? Notre fédération n’a eu de cesse de dénoncer la réforme de l’enseignement professionnel sous statut scolaire qui vise à le rapprocher de l’apprentissage et ainsi à transférer tout un pan de la formation de ces jeunes au secteur privé. 170 heures de cours ont été supprimées sur la formation en bac professionnel. La rentrée en lycée professionnel s’est faite sans texte officiel et avec simplement une note de service sur le réaménagement de la terminale bac pro et le passage baccalauréat en mai. Ce sabotage organisé dans le mensonge doit cesser et des mesures urgentes doivent être prises.
Dans le même temps, comment ne pas s’indigner des financements record attribués par les régions à l’enseignement privé catholique révélés dans la presse ? En Nouvelle Aquitaine ces cadeaux accordés au delà de leur obligation légale par la Région représenteraient la somme de 108 millions d’euros entre 2016 et 2023. Voilà qui contribue encore au séparatisme scolaire et à l’affaiblissement du Service Public d’Education. L’argent public doit aller à l’enseignement public.
La FSU a d’autres ambitions pour les élèves : celle d’un Service Public permettant la réduction des inégalités et l’émancipation des élèves. Cela passe impérativement par une meilleure considération des personnels et de leurs métiers.
Ce CDEN de rentrée ne peut pas rester sourd à la dégradation du service public d’Education dans notre département. Le travail des agentes et des agents est dégradé, au quotidien, dans chaque école, collège et lycée. La qualité de l’accueil et de l’accompagnement des jeunes Corréziens en pâtit.
Nous étions en grève mardi 1er octobre pour refuser les politiques d’austérité et de casse des Services Public. Financer le Service Public d’Education n’est ni une charge, ni un coût, c’est un investissement pour l’avenir et c’est la condition de la mise en œuvre de la promesse républicaine et démocratique sur laquelle pèsent aujourd’hui tant de menaces.

Déclaration de la FSU au CDEN du 8 octobre 2024